Billetterie
ZAZ
LE FOYER
jeudi 4 juillet 2019 - 22:00
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ZAZ avait fait l’équivalent de trois tours du monde en quatre ans, alors elle a pris une pause. Une pause à la Zaz, énergique et passionnée : elle a créé un festival citoyen à Crussol en Ardèche, produit l’album Gipsy Traffic de son guitariste Guillaume Juhel, voyagé à l’écart des routes de tournée…
L’album s’est construit ainsi, entre l’urgence créative et la patience d’une artiste furetant parmi les propositions qui lui arrivent en masse. Il est vrai que son dernier album de chansons originales, Recto Verso, qui s’est vendu à plus de 1,5 million d’exemplaires, date de 2013 et que son regard sur le monde a été profondément remodelé par ses voyages et ses rencontres.
Elle n’avait pas donné de brief aux auteurs ni complètement défini une direction. Il lui fallait des chansons qui lui ressemblent, qui répondent à son besoin d’incarnation, de transparence, de franchise dans son cheminement en plein soleil comme dans les zones d’ombres. Parce que ZAZ ne s’en cache pas : tout ne jaillit pas avec évidence. Si des millions d’auditeurs et de spectateurs sont régulièrement émus aux larmes ou regonflés d’énergie vitale par ses chansons, elle-même doute, tente, jette, recommence avant qu’elle juge enfin que ses chansons sont vraies.
A l’écoute d’Effet miroir, on ne devine pas forcément lesquelles sont de sa plume et lesquelles lui ont été offertes. Dès l’ouverture de l’album, Demain c’est toi parle d’un enfant à venir. « C’est comme si c’était mes mots », dit-elle à propos du texte de Gaël Faye. Dans J’aime j’aime, Marion Romitti lui dessine un autoportrait de solitaire songeuse et, dans Je parle, Ben Mazué la montre avec le verbe haut (« Moi je parle / Je tente, je tente, j’essaie / Tu sais y’a pas de mal / C’est le silence qui m’effraie »).
Mais Ma valse et sa manière douce de se montrer, c’est son stylo à elle, à cinq heures du matin, la voix de la maquette étant conservée jusqu’à l’album : « Regardez-moi sourire / Comme une rose au vent / Flotter, m’embellir / Sous le désir ardent / D’être vivante et reine / Dans mon monde innocent ».

Pour Résigne-moi, elle a aimé une démo d’Ilan Abou, enregistré un morceau énergique en « yaourt » en studio puis écrit et finalisé le titre chez elle : « J’essaie d’comprendre mes sentiments / Me reconnaître dans tous ces faits / Me reconnaître pour mieux m’aimer /
Je le sais bien mais faut l’intégrer / Plus dans mon corps que dans ma psyché / Résigne-moi, résigne-moi ».
ZAZ clôt son album par un souvenir de voyage, Laponie, dans lequel elle raconte, entre confession et slam, ses interrogations d’artiste, la splendeur glacée du Grand Nord et nos vies à tous. Des images lointaines qui éclairent le titre de l’album, Effet miroir, dont elle dit :
« Tout ce que l’on voit du monde, c’est notre vision, à travers nos codes, ce que l’on aime, ce que l’on déteste, ce qui nous met en colère, ce que nous fabriquons… Quand on regarde autour de soi, c’est souvent soi-même que l’on voit. »
Effet miroir aurait pu être un double album tant elle avait à dire sur son parcours propre ou sur ses inquiétudes et ses espoirs pour le futur. Jamais elle ne s’était autant impliquée dans l’élaboration d’un album, à toutes les étapes de la création et en cherchant toujours la plus exacte justesse – la couleur dechaque instrument, la sincérité de chaque mot abordant sa vie personnelle, la pertinence de son expression citoyenne…
Troisième album de chansons inédites seulement depuis 2010, auquel il faut ajouter deux live et son album Paris, hommage à sa ville d’adoption, Effet miroir s’est nourri de multiples aventures et collaborations. Mi-nomade, mi-parisien, il s’est donc fabriqué principalement avec les équipes de production de Jo Francken et Ilan Abou. Mais aussi dans une escapade à Montréal dans le studio de Patrick Watson, qui mêle sa voix à la sienne sur Mes souvenirs de toi. Ou, pour une autre collaboration, dans le studio du chanteur Raphael pour y enregistrer le très cinématographique Saint-Valentin. Elle fait aussi un pas de côté très dansant avec Pourquoi tu joues faux de Mathieu Boogaerts, et partage avec les Triggerfinger une énergie folle à la mélodie beatlesienne dans Toute ma vie de Jérémie Kisling…
En cours de route, elle s’est fait le plaisir d’une tournée de onze dates finançant le projet Zazimut, l’association qu’elle a créée, au profit d’initiatives associatives et environnementales locales, tout en présentant de nouvelles chansons. Les fans se sont aussitôt accaparés de nouveaux hymnes comme On s’en remet jamais qui affronte tous les deuils avec une inépuisable pulsion de vie, ou Plume, reggae martial de Florian de Taevernier qui veut « Rencontrer le soleil juste pour voir de quoi il a l’air », ou encore l’élan hispanique de Qué vendrá, le premier single de l’album.
La chanson Nos vies, du chanteur Tibz, sonne elle comme l’autoportrait collectif d’une génération : « Pour sûr, que l’on est bien ensemble / Je jure, que nos vies se ressemblent / À toute allure, j’attends qu’on se rassemble / Pour sûr, que l’on est bien ensemble ».
Quant à la chanteuse, quant à son extraordinaire aventure artistique sur plusieurs continents, on la voit bien dans Si c’était à refaire, dont le texte est cosigné par Sophie Maurin et Lise Chemla : « Je chante, je chute, j’avance, j’accélère / Et si c’était à refaire / Sans fard, féroce comme une mère / Je suivrais mes traces dans la poussière ». ZAZ nous montre là comme son miroir est vaste. On s’y voit aussi…