Séverin
La Terrasse
samedi 9 juillet 2016
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Parfois, un ami nous fait des confidences. Et, alors qu’il se confie et se raconte, on a l’impression qu’il parle à la deuxième personne du singulier.

Le nouvel album de Séverin fait cette impression, entre confession personnelle et portrait d’une génération, entre exploration intime et chanson

généreuse. Il explore les affres de la rupture, la force vitale qui fait s’en relever, les secrets de la transmission familiale, la douceur du couple, les pesanteurs de la comédie sociale. Et l’aventure commence par une sorte de biguine consolatrice en apesanteur, Ça ira tu verras – une belle leçon de résilience au quotidien. 


Après plusieurs albums au sein du duo One-Two puis en solo, Séverin s’éloigne de la pop légère et abstraite. Il confesse « avoir eu besoin d’un disque
autocentré ». Il passe par toutes les étapes : introspection, isolement à la campagne pour écrire, doutes, bouffées mélancoliques, brusques accélérations créatives… Le travail de composition s’étale sur trois ans. Séverin fait le choix de ne conserver que la dizaine de chansons qui poussent le plus loin le dévoilement, écarte celles qui se contentent de jouer sur les mots ou de dessiner quelques anecdotes. `« Je voulais de l’humour et de l’autodérision, mais surtout que tout soit vrai. »


Alors il crée son propre label, Neon Napoleon, et s’entoure d’une équipe fervente : au piano, Ambroise Willaume, ex-Revolver et animateur du projet électro néoclassique Sage ; aux guitares, Jean Felzine de Mustang ; Mathias Fish à la batterie ; Steffen Charron à la basse… 

Il ne pousse pas le travail de maquette plus loin qu’un guitare-voix sommaire car, à l’enregistrement, Séverin veut « que tout le monde se sente libre ». Il ne doit pas s’agir de rejouer les démos des chansons en se pressant pour économiser les jours de studio, mais bel et bien de donner vie aux chansons. Cinq jours d’enregistrement, deux titres par jour et une méthode presque immuable : après  l’écoute collective de chaque maquette, Jean Felzine s’isole pour trouver le bon son de guitare et l’élaboration collective commence. Atmosphères sixties ou échappées lettrées, coups de fouets rock et rêveries bossa-nova…


Au passage, Séverin partage une chanson farceuse et acide, Contrôle ta samba, avec Katerine, et le doux France-Brasil avec son épouse Kiwi da Gama.

Il ne cache pas ses références, de Renaud et Alain Souchon pour l’écriture à la Samba Saravah de Pierre Barouh pour sa distinction chaleureuse. Il a
d’ailleurs emprunté un chemin comparable à celui de l’auteur de la bande originale d’Un homme et une femme : après des années de pop, son histoire d’amour avec une Brésilienne l’a conduit à découvrir un continent de musique, au tempérament à la fois très proche et très lointain pour un Français. « J’aime la manière très directe dont la musique brésilienne décrit des émotions très simples, très fortes – la joie, la tristesse, l’impatience, la nostalgie… C’est très différent de la pudeur française. »


Très différent et très fondateur… Séverin ose écrire et chanter « droit au but, sans louvoyer. Cela crée des choses fragiles, avec le risque de se vautrer. Mais on entend le coeur qui bat. »
Le sien. Le nôtre, aussi.